Pas facile de parler d’une humiliation qui a duré plusieurs mois, de se livrer à cœur ouvert à des inconnus du même âge que soi, même si ces derniers sont animés de bons sentiments. Mais URBAN STREET REPORTERS n’est pas un média comme les autres : nous donnons la parole à ceux dont les voix méritent d’être entendues. Kaoutar a très vite compris l’objectif de notre projet. Cette jeune fille âgée de 16 ans a accepté de s’exprimer à propos du calvaire psychologique qu’elle a subi dans la douleur et le silence : le harcèlement à l’école.
Peux-tu te présenter à nos lecteurs ?
Je m’appelle Khaoutar, j’ai 16 ans et je suis actuellement lycéenne.
Pourquoi es-tu victime d’harcèlement ?
Je pense que je suis victime de harcèlement par rapport à mon handicap (elle souffre de graves problèmes de vue, cécité de l’œil gauche et sans traitement, l’œil droit sera lui aussi touché, NDLR)
Où est-tu harcelée ? Quels types de harcèlements subis-tu ?
Tout à commencé au lycée, je subis un harcèlement moral car je suis différente.
Comment as-tu réagi face à tes agresseurs ?
Au départ, je m’en contrefichais puis lorsque les moqueries sont devenues récurrentes j’en ai parlé à ma famille.
As-tu été soutenue lors de ces moments difficiles ?
Oui, par mes proches et ma famille. J’ai aussi rencontré les membres de l’association « Espoir et Création » et au fil de mes visites au sein de la structure, je me suis sentie en confiance et j’ai pu me confier. Cela m’a beaucoup aidé. Ils ont été d’un grand soutien.
Qu’elle a été la réaction de tes proches lorsqu’ils ont découvert le calvaire que tu endurais depuis plusieurs semaines ?
D’abord, il faut savoir que je me suis confiée 4 mois après le début du harcèlement. Durant ces 4 mois, je rentrais à la maison comme si de rien n’était. Rien ne laissait penser que quelque chose clochait. C’est seulement lorsque j’en ai parlé que ma famille l’a su. Aucun d’entre eux n’avait rien deviné.
Source : http://pedagogie.ac-toulouse.fr
Justement, tes sœurs t’ont accompagné : avez-vous remarqué un changement durant ces 4 mois ?
Non, elle faisait comme si rien ne se passait : elle nous parlait pas, partait et rentrait des cours sans rien exprimer. On ne se doutait absolument de rien, c’est au bout de ces 4 mois que l’on a su ce qu’elle subissait. La colère nous a gagné car ces personnes sont inhumaines : on n’a pas le droit de se comporter de cette manière envers qui que ce soit, surtout lorsqu’une personne est victime d’un handicap.
A la suite de ça, comment avez-vous agit afin de la soutenir et de trouver une solution à ce problème ?
On a immédiatement contacté le CPE de l’établissement qui a rempli son rôle en mettant au courant les parents de ses « agresseurs ». Ensuite on a essayé de la soutenir lors ce période difficile, en lui demandant de ne pas prendre en compte de ces méchancetés gratuites.
Avez-vous perdu le sommeil au sein de votre famille ? Tes parents en ont-ils parlés ?
Bien sûr, on y pense sans cesse : il n’y a pas un moment où l’on ne pense pas au bien-être de ses enfants. C’est tout à fait normal.
Depuis quand cela dure ?
Depuis le début de l’année scolaire.
Tes professeurs ont-ils remarqué un changement ?
Absolument pas puisqu’ils s’arrangeaient pour que les professeurs ne soit au courant de rien, agissant dans l’ombre.
Tu n’es pas allée voir ton professeur principal ?
Si, je suis allée voir ma professeure principale. De plus, ma sœur l’a même contacté par téléphone. Au moindre souci, je pouvais la tenir au courant.
Que penses-tu des personnes qui harcèlent (ses sœurs)?
Ce sont des enfants dans leurs têtes : elles n’ont aucune conscience du mal qu’elles distribuent gratuitement, des répercussions de ce genre d’agissements. Que Kaoutar rentre à la maison, les larmes aux yeux, le moral dans les chaussettes car elle ne supporte plus les moqueries dont elle est victime. Qu’il faut qu’elles se mettent à la place des handicapés qui souffrent accompagnés de leur proche ainsi que leurs familles.
Est-ce que l’idée d’aller s’entretenir avec les bourreaux de Kaoutar vous a traversé l’esprit (ses sœurs)?
Bien sûr, on y a pensé à plusieurs reprises néanmoins cela ne s’est pas fait pour de multiples raisons. Tout en prévenant Kaoutar qu’à la moindre moquerie, nous agirons en allant voir directement les jeunes ainsi que leurs parents afin de mettre les choses au clair.
Avez-vous été pris d’une incompréhension, d’une colère à certains moments (ses sœurs)?
Comment ne pas l’être, quand on entend sa petite-soeur s’exprimée sur des moqueries qu’elle recevait, cela nous a perturbés. Et ça nous hante encore.
Quelle message veux-tu faire passer à tes détracteurs ?
Vous ne vous rendez pas compte du mal que vous faites, je ne le prends pas pour de simples moqueries.
As-tu déjà rencontré des jeunes dans ton cas ?
Non, cependant j’aimerais bien en rencontrer.
Quels conseils peux-tu donner à ces personnes victimes de harcèlement ?
Je conseille à ces personnes d’en parler à leurs entourages, leurs familles et leurs proches. Que ce soit au lycée ou au collège, il ne faut pas laisser la situation se prolonger, s’aggraver de jour en jour. Sinon, ils n’arrêteront pas. Ces personnes continueront temps que vous resterez muet(te), car pour elles, vous ne vous révoltez pas donc vous êtes faibles.
Penses-tu que ton lycée et l’équipe pédagogique t’ont assez soutenu dans l’affaire, qu’ils aient fournit le maximum ?
Non, ce n’est pas suffisant.
Qu’attends-tu d’une école dans laquelle un ou plusieurs élèves sont victimes de harcèlement scolaire ?
Que cette dernière puisse suivre et assisté la victime, qu’elle ne se limite pas simplement à l’appel des parents d’agresseurs. C’est également important de faire des interventions en classe, afin de sensibiliser les élèves au handicap. Car beaucoup de jeunes ne connaissent pas cet environnement, ce mode de vie. Cependant, je me souviens d’une intervention avec une vidéo (campagne de sensibilisation du gouvernement concernant le harcèlement scolaire) mais mes camarades de classe l’ont pris en rigolades, ça ne les a pas touchés.
Pourquoi ce témoignage aujourd’hui ?
Je témoigne afin d’aider les personnes qui sont, aujourd’hui, victimes d’harcèlements tout en sensibilisant les personnes qui harcèlent.
Depuis qu’elle en a parlé avec ses proches et notre association, elle se sent beaucoup mieux. D’ailleurs, elle a participé à la journée de la femme que nous avons organisée : c’est une une immense joie que nous avons pu retrouvé un Kaoutar beaucoup plus sereine, prête à aller de l’avant.
INTERVIEW VIDÉO (KAOUTAr)
INTERVIEW VIDÉO (SŒURS DE KAOUTAR)
Laisser un commentaire